lundi 26 juillet 2010

Claire Dans la Nuit - 4


« J'aime beaucoup rencontrer des jeunes comme vous. On vous voit presque toujours dans les endroits ou on vous cherche trop pour s'attendre à vous trouver. Et j'ai mes petites idées sur comment vous êtes arrivés ici. Mais en avez vous sur mon compte? Je vous avoue que je prends comme un miracle le fait d'être ici réveillé sur ces morts que j'aurais dû rejoindre il y a longtemps. Je jouais, vous savez, de la musique, comme un jeune con puis comme un con sur le retour, avant de devenir le vieux con que vous voyez aujourd'hui »

Comme pour le soutenir, sa voix se fit bizarrement chantante.

« J'ai vu les lumières de la ville, après avoir déserté ma campagne,. Mais les lumières de la ville ne m'ont pas réchauffé. J'ai plongé de froid dans les bras des filles ou inversement, cela revient au même. Je les faisait chanter, danser et vivre, et je n'en ai oubliée aucune, de la première enfant à la dernière dame, de mon plus cher amour, jusqu'à la dernière salope qui m'a attrapé un soir de solitude. Crasse soit-il de cette sorcière, d'ailleurs. Les femmes encore belles de quarante ans sont celles qui ont le plus faim me glissa-il avec un clin d'œil que je trouvais dégoutant. »
Là c'est Claire que je vis avoir un frisson. Elle avala une grande gorgée de la bouteille
noire.
« Il était tard dans le deuxième arrondissement de Paris, je n'avais pas dormi dans un lit depuis trois jours. Quand je la vis et qu'elle me toucha j'attrapais une gaule infernale. Me croirez-vous si je vous dis que je ne me souviens pas de son nom? J'aimerais vous dire qu'elle s'appelait Schéerazhade mais c'en était une autre. Cette femme me prit dans son lit et me rendit fou. Elle me donna cette poudre dorée qui fait chanter les vieux chanteurs sur vos disques préférés et me tendis le pire piège qu'on puisse imaginer. Je restais allongé, et laissait le rêve me pénétrer jusqu'à l'extase mouvante de la liberté. Nous faisions l'amour pendant des heures et des heures, et cette volupté ajoutée à l'autre dépassait tout, tant et
tant, que je n'ai jamais pu jouir quand j'en avais pris. Je pensais qu'elle avait besoin de quelque chose de plus, et je pensais que ce quelque chose, c'était moi. Mais visiblement J'avais eu tort, et bientôt, tous les plaisirs du monde me furent retirés. Je suis retourné quelques fois chez elle, et puis plus tard, je ne suis jamais revenu. »

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